Comment la mortalité due à la Covid-19 se compare-t-elle à celle due à la grippe ?

Un an après le début de l’épidémie de Covid-19, le coronavirus SARS-CoV-2 a fait 68 000 victimes en France. Ce chiffre est-il comparable aux épidémies de grippes qui frappent chaque hiver notre pays ? Au début de l’épidémie de Covid-19, certains parlaient de « grippette » pour en minimiser l’importance. Qu’en est-il un an après ? Le bilan en termes de morts se compare-t-il à celui d’une épidémie de grippe ? Et combien de morts la grippe elle-même entraîne-t-elle ?

Les deux vagues de surmortalité liées à la Covid-19

La Covid-19 a entraîné deux vagues de surmortalité en France depuis son début, l’une au printemps 2020, l’autre à l’automne 2020. L’ampleur de chacune peut être comparée à celle des vagues de surmortalité des cinq années précédentes, toutes liées à des épidémies de grippe saisonnière (figure 1). L’excès de mortalité qui accompagne chaque vague est estimé par Santé publique France de façon indirecte en comparant semaine après semaine les décès observés avec les décès « attendus », c’est-à-dire estimés par le profil saisonnier moyen des dernières années.

La surmortalité a été d’environ 20 000 décès supplémentaires dans les hivers 2016-2017 et 2017-2018, et 12 000 dans l’hiver 2018-2019. On estime qu’elle est directement imputable à la grippe dans 70 % des cas environ lors des hivers les plus meurtriers, soit environ 14 000 décès en 2016-2017, autant en 2017-2018, et 8 000 durant l’hiver 2018-2019.

La surmortalité liée à la première vague de l’épidémie de Covid-19, au printemps 2020, équivaut à celle des épidémies de grippe meurtrières de 2016-2017 et 2017-2018, le pic étant plus élevé pour la Covid-19 et plus concentré dans le temps. En revanche, la surmortalité de la vague d’automne est sensiblement supérieure, même en se limitant aux décès survenus en 2020. Le pic est moins haut, mais plus étalé. Le bilan total incluant les décès de 2021 s’annonce déjà beaucoup plus important que ceux des épidémies de grippe des dernières années.

L’épidémie de Covid frappe les personnes âgées, mais guère plus que les autres causes de décès, et moins que la grippe

Si l’on veut comprendre les facteurs de l’épidémie et pas seulement mesurer son ampleur, il ne suffit pas de dénombrer les décès en isolant ceux dus à la Covid-19, il faut aussi connaître le nombre de décès par sexe et âge. La base de données sur la démographie des décès par Covid-19 mise en ligne par l’Ined, actualisée chaque semaine et assortie de notices sur les sources, les définitions et la qualité des informations, fournit pour certains pays dont la France le profil des décès par sexe et âge. Utilisons ces informations pour savoir si la Covid-19 tue surtout des personnes âgées, comme on le dit souvent, ou si elle tue à tout âge.

C’est un résultat important : la répartition par âge des décès dus à la Covid-19 est assez proche de celle de la mortalité générale (figure 2). On a beaucoup dit que les personnes âgées étaient, de loin, les premières victimes de l’épidémie de Covid-19. C’est vrai, mais à peine plus que pour les autres causes de mortalité.

De nos jours, fort heureusement, on meurt la plupart du temps à des âges élevés, rarement dans la jeunesse ou à l’âge adulte. La mortalité par Covid-19 ne s’éloigne guère de ce schéma général. En revanche, ce profil par âge du risque de décès s’éloigne sensiblement du profil observé ces dernières années pour la grippe saisonnière, qui épargne davantage les jeunes et les adultes d’âge moyen.

Rappelons cependant que la proximité des risques de décès par âge entre la Covid-19 et la mortalité générale ne doit pas conduire à minimiser l’épidémie. Le bilan de l’année 2020 reste accablant : l’épidémie de Covid-19 a interrompu 68 000 vies dans notre pays dans cette seule année.

La version originale de cet article a été publiée sur La Conversation, un site d'actualités à but non lucratif dédié au partage d'idées entre experts universitaires et grand public.

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